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Dix mesures en matière de logement annoncées dans le budget 2024

23 avril, 2024   |   Par Kadiatou Bah

Le budget 2024 comprend une série de mesures plus modestes qui passent inaperçues pour la plupart, notamment un Fonds de contrôle des loyers à court terme et une déduction pour amortissement accéléré pour la construction de nouveaux logements locatifs.

Après des semaines d’annonces teaser, le gouvernement du Canada a finalement dévoilé mardi le budget 2024 , fortement axé sur le logement et présenté comme un plan qui apportera « l’équité pour chaque génération ».

« Une chance équitable de bâtir une bonne vie de classe moyenne, de faire aussi bien que ses parents, ou mieux, telle est la promesse du Canada », a écrit la ministre des Finances et vice-première ministre Chrystia Freeland dans l’avant-propos du budget.

Le budget 2024 est divisé en huit sections distinctes, dont la première est consacrée au logement et intitulée simplement « Des logements plus abordables ». La section comprend de nombreuses mesures visant à remédier à la crise de l’abordabilité du logement, dont plusieurs ont été annoncées par le premier ministre Justin Trudeau au cours des dernières semaines.

L’annonce qui a fait couler le plus d’encre

La principale annonce du budget fédéral qui a retenu l’attention est l’augmentation de l’impôt sur le gain en capital.

Devant les inquiétudes de certains propriétaires de plex, Chrystia Freeland, a affirmé que l’augmentation de l’impôt sur le gain en capital proposée par le budget fédéral ne toucherait que les mieux aisés.

Dans le budget fédéral le taux d’inclusion proposé du gain en capital passe de 50 % à 66 % à partir du seuil de 250 000 $, dès le 25 juin. Québec va également suivre les pas du fédéral.

Plusieurs journaux canadiens ont rapporté les critiques des investisseurs immobiliers, qui s’estiment injustement touchés par cette mesure qui vise les mieux nantis.

Freeland fait valoir que plusieurs modalités de la mesure fiscale font en sorte d’épargner les propriétaires de la classe moyenne. Elle a mentionné, en conférence de presse à Montréal lundi pour promouvoir son budget, que le gain en capital sur la résidence principale n’est pas touché.

Autrement dit, le “propriétaire occupant” d’un plex ne paierait pas d’impôt sur la proportion du gain en capital liée à sa résidence, seulement sur les gains liés à l’espace qu’il loue.

Le budget comprend également une poignée d’actions qui n’ont pas encore été annoncées. Beaucoup de ces actions sont de moindre ampleur et associées à des montants moindres que ce qui a déjà été annoncé, mais elles pourraient néanmoins avoir un autre impact pour les acteurs dans le secteur immobilier.

Accélérer les investissements pour construire davantage d’appartements

Le gouvernement du Canada affirme vouloir s’appuyer sur le succès de la suppression de la TPS sur les nouvelles constructions locatives en « prenant d’autres mesures pour que les calculs fonctionnent pour les constructeurs d’habitations ».

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement annonce qu’il introduira une déduction pour amortissement accéléré temporaire de 10 % pour les nouveaux projets de construction de logements locatifs admissibles dont la construction commencera le 16 avril 2024 ou après et qui pourront être emménagés par les résidents avant le 1er janvier 2036.

Le gouvernement fédéral affirme que l’augmentation de l’allocation à 10 %, contre 4 % actuellement, « encouragera les constructeurs en faisant passer les projets d’irréalisables à réalisables, grâce à un retour sur investissement après impôt accru » et coûtera au gouvernement environ 1,1 milliard de dollars sur cinq ans.

« La mesure ne modifie pas le montant total des dépenses d’amortissement déduites dans le temps, elle l’accélère simplement », ajoute le gouvernement. « Permettre aux constructeurs d’habitations de déduire certaines dépenses d’amortissement sur une période plus courte leur permet de récupérer une plus grande partie de leurs coûts plus rapidement, ce qui leur permet de réinvestir davantage leur argent dans de nouveaux projets d’habitation. »

Réprimer les locations à court terme

Peu de temps après que le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique a annoncé sa série de mesures contre les locations à court terme en octobre, la vice-première ministre Chrystia Freeland a déclaré que le gouvernement fédéral « examinait activement » les options qu’il pourrait prendre contre les locations à court terme au niveau fédéral.

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il lancerait un Fonds de contrôle des loyers à court terme de 50 millions de dollars. Peu de détails ont été révélés, le gouvernement affirmant qu’il s’engage actuellement avec les parties prenantes pour « concevoir un programme qui répondra aux besoins municipaux ». Plus de détails devraient être annoncés plus tard cette année.

Examen du portefeuille des terres fédérales

S’inspirant du manuel de développement du logement de la Colombie-Britannique, le gouvernement fédéral affirme qu’il procédera à un « examen rapide de l’ensemble de son portefeuille de terres fédérales afin d’identifier davantage de terrains pour le logement ». À la suite de l’examen, il faudra que les ministères et organismes gouvernementaux offrent des parcelles de terrain spécifiques en fonction des objectifs, en consultant d’autres niveaux de gouvernement et le secteur privé pour identifier davantage de terrains à mettre à disposition pour la construction de logements.

Enfin, le gouvernement publiera une nouvelle « Banque foncière publique » qui comprendra un inventaire des terres disponibles. Le gouvernement fédéral affirme qu’il publiera cette banque de terres publiques avant l’automne 2024 et affirme qu’il pourrait introduire une loi, si nécessaire, pour « faciliter l’acquisition et l’utilisation de terres publiques pour des habitations ».

Restructuration de la Société immobilière du Canada

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement fédéral affirme avoir réservé 5 millions de dollars sur trois ans, à compter de 2024-2025, pour soutenir une « refonte » de la Société immobilière du Canada, la société d’État autofinancée spécialisée dans le réaménagement de biens immobiliers autrefois propriété du gouvernement du Canada.

Le gouvernement fédéral affirme que ces « réformes » comprendront le lancement plus précoce des processus de réaménagement, le regroupement de plusieurs propriétés à transférer en même temps, la conversion de bureaux gouvernementaux sous-utilisés en propriétés à usages multiples et la collaboration avec d’autres sociétés d’État pour réaménager leurs propriétés excédentaires ou sous-utilisées, entre autres choses.

Par ailleurs, dans le cadre du budget 2024, le gouvernement fédéral a réservé 4 millions de dollars sur deux ans à la Société immobilière du Canada pour soutenir quatre projets de logements modulaires. Ces quatre projets sont : Shannon Park en Nouvelle-Écosse, Village at Griesbach à Edmonton, Downsview à Toronto et Wellington Basin à Montréal.

Créer un conseil d’action sur les terres publiques

Afin de « stimuler la collaboration et doter tous les acteurs des outils dont ils ont besoin pour construire des maisons sur les terres publiques », le gouvernement fédéral annonce qu’il lancera un nouveau Conseil d’action sur les terres publiques dès ce printemps.

« Le Conseil d’action pour les terres publiques rassemblera tous les acteurs afin d’identifier des parcelles de terrain spécifiques à travers le Canada présentant un potentiel élevé d’habitation et de prendre des mesures concertées pour accélérer la construction sur ces terrains », a déclaré le gouvernement. « Ce groupe contribuera également à façonner l’approche du gouvernement fédéral en matière de construction de maisons sur les terres publiques, y compris la conception du Fonds d’acquisition des terres publiques. »

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement du Canada a réservé 1,8 million de dollars sur deux ans au Bureau du Conseil privé pour créer un Secrétariat du Conseil d’action sur les terres publiques.

Tirer parti des propriétés de Postes Canada

Postes Canada gère un portefeuille qui comprend 1 700 bureaux de poste répartis dans 1 700 communautés. Le gouvernement fédéral affirme que bon nombre de ces propriétés sont des immeubles de petite hauteur qui peuvent être « exploités pour construire de nouvelles maisons partout au pays, tout en maintenant les services de Postes Canada ».

À l’heure actuelle, six propriétés de Postes Canada sont en cours d’évaluation pour le développement de logements, trois au Québec, deux en Colombie-Britannique et une en Alberta, et le gouvernement fédéral affirme que beaucoup d’autres pourraient potentiellement être libérées pour le développement de logements.

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement annonce qu’il lancera un nouveau Programme de logement de Postes Canada pour soutenir les fournisseurs de logements abordables qui construisent sur des propriétés cédées ou louées par Postes Canada. Plus de détails devraient être annoncés plus tard cette année. De plus, le gouvernement permettra également à Postes Canada de donner la priorité à la location ou à la cession de ses propriétés présentant un fort potentiel de logement.

Moderniser les données sur le logement

« Pour mieux comprendre les besoins des marchés immobiliers locaux, nous avons besoin de meilleures données », déclare le gouvernement fédéral. « Chaque ordre de gouvernement devrait s’engager à apporter une réponse à la crise du logement fondée sur les données. »

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement fédéral a réservé 20 millions de dollars sur quatre ans à Statistique Canada et à la SCHL pour « moderniser et améliorer la collecte et la diffusion des données sur le logement, y compris les données municipales sur les mises en chantier et les achèvements ».

Cesser les terres de la Défense nationale

À l’instar de Postes Canada mentionnée plus haut, le gouvernement fédéral affirme que le ministère de la Défense nationale possède 622 propriétés totalisant 2,2 millions d’hectares à travers le Canada, dont beaucoup ne sont pas pleinement utilisées et pourraient être utilisées pour construire davantage de maisons.

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement a annoncé qu’il avait commencé à explorer le réaménagement des propriétés de la Défense nationale à Halifax, Toronto et Victoria, et qu’il se départirait également de 14 propriétés excédentaires qui ne sont plus nécessaires. L’examen susmentionné du portefeuille des terres fédérales devrait également permettre d’identifier davantage de propriétés de ce type.

Transformer des bureaux fédéraux sous-utilisés en logements

Dans le cadre du budget 2024, le gouvernement affirme qu’il accordera 1,1 milliard de dollars sur 10 ans à Services publics et Approvisionnement Canada afin de réduire son portefeuille de bureaux de 50 %. Ce financement contribuera à accélérer la résiliation des baux et la cession des immeubles de bureaux fédéraux sous-utilisés, qui pourront ensuite être transformées en logements, en mettant l’accent sur les logements étudiants et les logements hors marché.

« Aujourd’hui, Services publics et Approvisionnement Canada possède plus de 6 millions de mètres carrés d’espaces de bureaux, dont environ 50 % sont sous-utilisés ou entièrement vacants », affirme le gouvernement fédéral. « Il ne s’agit pas d’une utilisation efficace des ressources, particulièrement à une époque où le Canada est confronté à une pénurie de logements. Le gouvernement fédéral va de l’avant avec un effort d’élimination important pour réduire l’empreinte de ses bureaux. Cela permettrait à davantage d’immeubles de bureaux, en particulier dans les zones urbaines à se faire convertir en logements pour les Canadiens, tout en garantissant également une utilisation responsable des ressources gouvernementales.

Taxer les terrains vacants pour encourager la construction

« À une époque où nous devons construire le plus rapidement possible, cela n’a aucun sens que de bons terrains, dans de bonnes zones, restent là, sous-utilisés », déclare le gouvernement fédéral. « Alors que tous les gouvernements mettent en place des politiques pour lutter contre la pénurie de logements, on craint que certains propriétaires fonciers au Canada puissent s’asseoir sur des terrains aménageables, dans l’espoir de profiter de la hausse de la valeur des terrains alors que ces terrains pourraient plutôt être utilisés pour un développement résidentiel immédiat. »

En réponse à cela, le gouvernement a annoncé dans le budget 2024 qu’il envisageait l’introduction d’une nouvelle taxe sur les terrains vacants en zone résidentielle, afin de forcer les propriétaires fonciers et les promoteurs à construire plutôt que de s’asseoir sur les terrains. Le gouvernement du Canada affirme qu’il lancera des consultations sur cette nouvelle taxe potentielle plus tard cette année.