La Banque du Canada a maintenu ses taux d’intérêt inchangés pour une deuxième réunion consécutive, mais a laissé la porte ouverte à un resserrement plus poussé, même si les responsables prévoient une croissance économique plus faible.
Les décideurs politiques dirigés par le gouverneur Tiff Macklem ont maintenu mercredi le taux de référence des prêts au jour le jour à 5 %, le niveau le plus élevé depuis 22 ans. Cette pause était attendue par les marchés et les économistes comme mentionné au Radar Multilogement du 24 octobre. C’est la quatrième fois que les responsables restent à l’écart au cours de ce cycle de taux, au cours duquel les coûts d’emprunt ont bondi de 475 points de base.
« Il est de plus en plus évident que les hausses passées des taux d’intérêt freinent l’activité économique et atténuent les pressions sur les prix », a déclaré la banque dans un communiqué. « Une série d’indicateurs suggèrent que l’offre et la demande dans l’économie sont désormais proches de l’équilibre. »
Les obligations à court terme se sont redressées, poussant le rendement canadien à deux ans à 4,73 % à 10 h 17 à Ottawa, en baisse d’environ 4 points de base par rapport à son niveau d’avant la décision sur les taux.
Malgré leurs prévisions d’une croissance économique plus lente, les décideurs politiques s’attendent également à une hausse de l’inflation à court terme et ne constatent pas encore de progrès en matière d’inflation sous-jacente, raison principale pour laquelle ils continuent de menacer avec de nouvelles hausses. Les responsables s’attendent désormais à une inflation moyenne de 3 % en 2024, contre 2,5 % prévu en juillet.
Le conseil des gouverneurs de la banque centrale est « préoccupé par la lenteur des progrès vers la stabilité des prix et par l’augmentation des risques inflationnistes », réitérant qu’il est prêt à augmenter davantage les taux si nécessaire.
Néanmoins, la détérioration des perspectives de croissance économique renforce l’idée que la banque a probablement fini d’augmenter ses taux et que les décideurs politiques pourraient bientôt être contraints d’orienter leurs discussions vers une baisse des coûts d’emprunt afin de préserver ce qu’on appelle un atterrissage en douceur.
Dans le rapport de politique monétaire qui l’accompagne, les responsables ont réduit de près de moitié la croissance du produit intérieur brut du troisième trimestre, à 0,8%, et prévoient une production du quatrième trimestre à 0,8%, trimestre après trimestre, aux taux annuels. Ils ont également révisé à la baisse la croissance pour cette année à 1,2% et l’année prochaine à 0,9%.
L’économie devrait connaitre une offre légèrement excédentaire au quatrième trimestre 2023. C’est l’une des principales raisons pour lesquelles la banque a supprimé de son communiqué de taux l’avertissement concernant une demande excédentaire persistante.
Au cours de l’année écoulée, la croissance du PIB a été en moyenne de 1 %, tandis que la croissance du PIB par habitant a été négative, chutant de 1,6 %.
L’écart de production est effectivement comblé, estimé entre -0,75 % et 0,25 % au troisième trimestre, ce qui suggère que les pressions sur la demande se sont rapidement atténuées. La banque s’attendait auparavant à ce que l’écart de production se résorbe début 2024.
Toutefois, l’économie plus équilibrée n’a pas encore entrainé un ralentissement de l’inflation notable. L’indice des prix à la consommation devrait rester « constamment élevé » à court terme, s’établira en moyenne à environ 3,5 % jusqu’à la mi-2024.
« Avec la lenteur des progrès vers l’objectif de 2% et l’augmentation des risques mondiaux d’une hausse de l’inflation, le risque que la désinflation s’arrête ou même que l’inflation puisse à nouveau augmenter a augmenté », a déclaré la banque dans le rapport.
Facteurs perturbateurs
Les risques à la hausse pour l’inflation comprennent des attentes inflationnistes élevées des ménages et des entreprises, une multiplication des événements météorologiques extrêmes et des incertitudes géopolitiques accrues, notamment la guerre entre Israël et le Hamas.
Les hausses de prix dans l’énergie et le logement, pressions à la hausse sur l’inflation, devraient « être partiellement compensées par l’atténuation de la demande excédentaire, une pression plus faible des coûts des intrants et une désinflation accrue des biens échangés à l’échelle mondiale », a déclaré la banque.
« L’offre excédentaire continue dans l’économie modère l’inflation des prix, contribue à atténuer les attentes d’inflation et encourage les entreprises à revenir progressivement à un comportement de tarification plus normal. »
Les décideurs politiques ont déclaré qu’ils souhaitaient voir une dynamique à la baisse de l’inflation sous-jacente et qu’ils continuaient à se concentrer « sur l’équilibre entre la demande et l’offre dans l’économie, les anticipations d’inflation, la croissance des salaires et le comportement des entreprises en matière de prix ».
Immobilier et endettement
Les ménages canadiens sont en moyenne plus endettés que leurs homologues américains et leurs prêts hypothécaires de plus courte durée se renouvèlent plus rapidement. Cela rend l’économie canadienne plus sensible à la hausse des taux d’intérêt et c’est l’une des raisons pour lesquelles la Banque du Canada a déclaré pour la première fois une pause en janvier, bien avant la Réserve fédérale américaine.
La prochaine décision de la banque centrale est attendue le 6 décembre, après deux publications de données sur l’emploi, les chiffres de l’inflation d’octobre et les chiffres du produit intérieur brut du troisième trimestre qui mèneront certainement la danse.