Articles

La qualité des prêts hypothécaires au Canada s’est « détériorée » : Banque du Canada

13 août, 2021   |   Par Kadiatou Bah

Le Canada était autrefois connu pour ses prêts hypothécaires conservateurs, mais ce cas de figure semble ne plus être valide. La Banque du Canada (BDC) a averti que la qualité des prêts hypothécaires s’était « détériorée » en 2020. La banque centrale a constaté que les ménages très endettés, ceux dont le ratio prêt/revenu est supérieur à 450 %, représentaient désormais une part record de la nouvelle dette hypothécaire.

Les ménages très endettés représentaient autrefois une petite part de la dette hypothécaire. La part a bondi en 2016/2017, lors de la mini-bulle de Toronto et de Vancouver. Des tests de résistance hypothécaires ont été déployés pour réduire la part, et cela a semblé fonctionner pendant un certain temps. Maintenant, ils sont de retour en force, avec plus d’un nouveau prêt hypothécaire sur cinq accordé à des ménages très endettés.

Les emprunteurs très endettés sont désormais détenteurs de 22 % des nouvelles dettes hypothécaires au Canada

La part de la dette hypothécaire nouvellement émise destinée aux emprunteurs très endettés a augmenté. Ces emprunteurs représentaient 21,7% des crédits immobiliers émis au quatrième trimestre de l’an 2020, un nouveau record. Il éclipse le précédent record établi au quatrième trimestre de 2016, lorsque Toronto et Vancouver ont connu une sorte de mini-bulle.

Après le test de résistance, la part est tombée à 12,3% des emprunteurs au deuxième trimestre 2018. Elle a commencé à décoller quelques trimestres avant la pandémie. Cela explique pourquoi la relance pandémique a été si efficace pour stimuler la demande. L’essor était déjà présent, et les mesures de relance ont donné aux emprunteurs une dette hypothécaire moins chère. Il y a quelques mois, l’industrie examinait ce problème qui se profilait, maintenant la Banque du Canada le reconnaît et en discute publiquement. Elle a divulgué le nombre d’emprunteurs hypothécaires assurés très endettés. 

Les emprunteurs très endettés représentent 23 % des prêts hypothécaires non assurés nouvellement émis

En cassant la tendance à la baisse, la majeure partie de la détérioration se produit avec les prêts hypothécaires non assurés. Les emprunteurs très endettés représentaient 22,6 % de la dette hypothécaire nouvellement émise au quatrième trimestre 2020. Il s’agit d’un nouveau record, écrasant le précédent record, qui s’était établi lorsque la part avait atteint 19,8 % au troisième trimestre 2017.

Post-stress test la part de ces emprunteurs trouve le fond à 13,4% des nouvelles hypothèques. Il convient de souligner que même après le test de résistance, la part ne retombe jamais au niveau de 2014. La nouvelle norme pour le risque ?

Les emprunteurs très endettés représentent 17 % de la dette hypothécaire assurée nouvellement émise

Les prêts hypothécaires assurés destinés aux emprunteurs très endettés augmentent. Ces emprunteurs représentent 16,6 % de la dette hypothécaire assurée nouvellement émise au quatrième trimestre 2020. Il s’agit d’un niveau élevé, mais toujours inférieur à la part de 20,8 % observée au sommet du troisième trimestre 2016. Cependant, près du triple du creux post-stress de 5,6% au deuxième trimestre 2019.

La variation dans les données des emprunteurs hypothécaires très endettés montre que le test de résistance a ses limites. En gros, c’est une question de sentiment, et le test de résistance a eu un important impact psychologique, pas technique. En 2017 et 2018, les prix des maisons individuelles à Toronto et à Vancouver ont plongé. Moins de gens veulent s’engager dans un gros prêt s’ils pensent qu’il y a un risque de perdre de l’argent. Le risque était palpable. 

Lorsque la pandémie a frappé, le gouvernement n’a pas seulement sauvé le marché immobilier, il l’a fait monter en flèche. Les propriétaires n’avaient pas besoin de payer leur hypothèque, les taux d’intérêt ont été réduits et l’assouplissement quantitatif rendait les hypothèques encore moins chères. Le gouvernement a même déclaré qu’il serait inacceptable que les prix des maisons baissent. Pourquoi une personne déciderait-elle de penser autrement ? 

L’aléa moral créé rend maintenant difficile de trouver un Canadien qui pense que les prix des maisons peuvent chuter. Cela a déclenché une vague d’acheteurs qui ne voient plus le risque de surpayer, car « les prix ne baissent pas ». Ils ne voient pas le risque de se dépasser, car ils pensent que cela sera toujours payant. Le seul risque qu’ils voient est de payer plus tard. Après tout, le gouvernement essaiera d’arrêter toute baisse des prix des maisons, mais le garantir est une autre histoire.