Les mises en chantier de logements au Canada ont continué de fléchir le mois dernier sous la pression des taux d’intérêt, selon de nouvelles données de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). La SCHL a ainsi indiqué mardi que le nombre total mensuel désaisonnalisé annualisé de mises en chantier a reculé de 9 % en juin par rapport à mai, pour s’établir à seulement 241 672 unités.
Cela contraste fortement avec l’augmentation de 10 % des mises en chantier d’avril à mai , annulant essentiellement ces gains, et correspond parfaitement aux perspectives du marché de l’habitation de la SCHL d’avril, qui prévoyait que « les mises en chantier diminueront en 2024, poursuivant la baisse par rapport aux niveaux records de 2021 ».
Dans les centres urbains, caractérisés par une population d’au moins 10 000 habitants, les mises en chantier ont chuté de 13 % d’une année à l’autre, a indiqué la SCHL, ajoutant que « la baisse d’une année à l’autre est attribuable à une baisse de 16 % des mises en chantier de logements collectifs, tandis que les mises en chantier de maisons unifamiliales étaient semblables à celles de juin dernier ».
Les données sont encore plus sombres à un niveau plus détaillé
Selon la SCHL, les mises en chantier dans deux des principaux marchés du pays ont été « nettement inférieures », l’activité ayant chuté de 60 % à Toronto et de 55 % à Vancouver au cours du mois. Entre-temps, ces deux villes ont enregistré des baisses « importantes » de la construction de logements collectifs.
Montréal a fait figure d’exception parmi les grands centres urbains, avec une hausse de 226 % des mises en chantier en raison de l’augmentation de l’activité dans le secteur des logements collectifs.
« Il convient également de noter l’augmentation de l’activité de construction à Calgary et à Edmonton, où les mises en chantier ont augmenté pour tous les types de logements, ce qui a entraîné une hausse du nombre total de mises en chantier de 38 % et de 67 % respectivement. »
Selon l’économiste en chef de la SCHL, Bob Dugan, « le contexte de taux d’intérêt plus élevés semble avoir rattrapé certains des principaux centres du Canada », et c’est cette activité, ou son absence, qui a fait baisser les indicateurs nationaux.
L’économiste de la TD, Marc Ercolao, a également souligné « la faible activité de prévente sur les marchés clés et les coûts élevés des intrants » comme raisons pour lesquelles les mises en chantier continueront de baisser à mesure que 2024 progressera, dans un commentaire sur les données de la SCHL de mardi.
En parlant de la pré-vente et en examinant de plus près l’un de ces marchés clés, la région du Grand Toronto et de Hamilton a connu une forte baisse des ventes avant construction au cours des deux dernières années, selon les données du premier trimestre du cabinet de recherche et de conseil Urbanation.
En avril, le cabinet a indiqué que les promoteurs immobiliers qui sont restés bloqués sur leurs projets de pré-construction au premier trimestre 2024 ont obtenu des résultats mitigés.
En fait, seulement 50 % des projets de pré-construction de la région ont été pré-vendus au cours du trimestre, contre un taux d’absorption moyen de 61 % il y a un an et de 85 % deux ans plus tôt.
Les résultats du deuxième trimestre sont attendus dans les prochains jours, a déclaré Urbanation, mais rien n’indique que les préventes reprendront dans un avenir proche.
Pour ceux qui ont la capacité de créer de nouveaux logements, le sentiment baissier du marché, associé aux coûts élevés de faire des affaires n’incite pas beaucoup à se remettre à construire.
La baisse significative des taux se fait attendre
La baisse des taux d’intérêt, combinée à une croissance plus modérée des coûts de construction et à un soutien gouvernemental accru, devrait être essentielle à ce que la SCHL a qualifié dans ses prévisions d’avril de « rebond partiel » des mises en chantier de logements, mais même cela n’est pas prévu avant 2025, ou peut-être même 2026.
Néanmoins, si les acteurs envisagent la baisse les taux pour obtenir un quelconque répit, il semble que l’économie canadienne est sur la bonne voie.
La Banque du Canada a annoncé la première réduction des taux d’intérêt du cycle le mois dernier, ramenant le taux directeur à 4,75 %. Il s’agit du chiffre le plus bas depuis juillet 2023.
Plusieurs croient qu’une nouvelle baisse est imminente. La publication mardi des mises en chantier de la SCHL a été accompagné d’une nouvelle lecture de l’indice des prix à la consommation de Statistique Canada, qui a révélé que l’inflation s’est établie à seulement 2,7 % en juin, en baisse par rapport à 2,9 % en mai.
« Bien que les marchés aient déjà largement anticipé une baisse des taux en juillet avant même la dernière publication de l’IPC de Statistique Canada, les données « confirment » presque une baisse des taux lors de la prochaine annonce de la Banque du Canada sur les taux », a déclaré l’économiste de la Banque CIBC Katherine Judge dans un article publié mardi.
Judge a également souligné qu’en retirant les huit composantes les plus volatiles de l’inflation, comme les coûts hypothécaires, les mesures préférées de la Banque du Canada « se situent à peine au-dessus de l’objectif de 2 % ».
Les économistes de RBC , Desjardins et BMO sont également favorables à une baisse des taux en juillet. Benjamin Reitzes, de BMO, en particulier, préconise une nouvelle baisse de 25 points de base, ce qui ramènerait le taux directeur à 4,5 %. Pendant ce temps, les économistes de la TD et de la Scotia restent indécis quant à ce que l’annonce de la Banque du Canada la semaine prochaine apportera.