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Comment l’inflation améliore l’efficacité d’une balance de prix de vente lors de l’achat d’un plex ?

26 octobre, 2021   |   Par Nikolaï Ray

Un dollar aujourd’hui n’a pas la même valeur qu’un dollar dans 5 ans. L’inflation effrite la valeur d’un dollar chaque mois et chaque année. De plus, il y a le coût d’opportunité. Si je suis capable d’investir mon dollar à un rendement annuel de 10%, j’aime mieux avoir mon dollar aujourd’hui afin de l’investir plutôt que de seulement recevoir mon dollar dans 5 ans. En ingénierie financière, on appelle cela l’effet du temps sur la valeur de l’argent, un concept qui va main dans la main avec ce que tout investisseur immobilier doit apprendre à maîtriser : l’accélération de la vélocité de son capital. Disons les vraies choses, nous n’avons pas une éternité pour atteindre nos objectifs en termes de cash-flow et/ou de valeur nette. Donc, à moins d’hériter d’une riche tante, nous devons manipuler les effets temporels qui dirigent la prise de valeur de notre capital. Or, un des outils fondamentaux que nous enseignons dans le certificat en ingénierie financière multilogement au Collège MREX est la balance de prix de vente (BPV), aussi connue sous le nom du solde de prix de vente. En quelques mots, c’est lorsque le vendeur de l’immeuble que vous achetez vous prête une partie de la mise de fonds en laissant un montant de la transaction en solde qui lui est dû, habituellement pour une période entre 1 et 5 ans. C’est un instrument financier assez simple, qui comporte son lot d’avantages pour le vendeur et pour l’acheteur. Mais en période inflationniste, elle peut être encore plus importante pour l’investisseur en phase d’acquisition. 

L’inflation et l’investisseur immobilier multilogement

Une période inflationniste peut être un moment inquiétant. Surtout considérant que nous sortons d’une décennie durant laquelle l’inflation a été aussi présente que le succès en séries éliminatoires Maple Leafs de Toronto. Étant donné que nous venons de vivre une période caractérisée par des taux d’intérêt historiquement bas et des TGA historiquement bas, il va de soi que la première réaction de la plupart des investisseurs lorsque l’inflation pointe son nez et d’être inquiet d’une remontée des taux d’intérêt. Quoique cet article-ci n’a pas comme objectif de débattre de la présence transitoire ou non de l’inflation ainsi que des mouvements futurs des taux d’intérêt, je me permets de vous présenter l’effet que l’inflation peut avoir sur vos investissements et sur votre psychologie. Si l’inflation était pour rester, les probabilités sont que les taux d’intérêt soient plus élevés. Des taux d’intérêt plus élevés réduisent la capacité d’emprunt lorsque vous achetez un plex étant donné que le financement des immeubles de 5 logements et plus est déterminé en partie par un calcul actuariel qu’on appelle la valeur économique. Habituellement lorsqu’on achète un immeuble à revenus, l’institution financière nous offrira un prêt qui sera égale à 75%-85% (selon si c’est un financement conventionnel ou assuré par la SCHL) du plus petit montant entre la valeur économique, le prix payé et l’évaluation agréée. Avec un taux d’intérêt plus élevé, toutes choses égales, le paiement hypothécaire mensuel sera plus élevé. Cela affecte négativement la valeur actualisée et réduit donc le montant de prêt maximal qu’on peut recevoir étant donné que la valeur économique n’est que la valeur actualisée divisée par le ratio prêt-valeur maximale de l’institution prêteuse. Le premier réflexe de plusieurs est de projeter que les valeurs des immeubles vont baisser, ce qui n’est pas nécessairement le cas (vous pouvez vous référer ici à l’article que j’ai rédigé sur ce sujet). La bonne nouvelle est qu’à moins que nous soyons plutôt dans une période de stagflation, soit une période dans laquelle l’économie souffre simultanément d’une croissance faible ou nulle et d’une forte inflation, il y a aussi des aspects qui peuvent affecter positivement les immeubles multilogements. La plus grande dépense des ménages est le logement. Donc en période inflationniste, généralement les prix des propriétés et les loyers ont tendance à augmenter. De plus, les meilleurs financements pour des immeubles à revenus stabilisés sont des hypothèques à taux d’intérêt fixe sur des termes de 5 à 10 ans. Si vous avez contracté un prêt de 2.5% durant une période durant laquelle l’inflation est à 2%, votre taux réel est de 0.5%. Si l’inflation monte à 4% par exemple, votre taux réel devient -1.5%.

Comment l’inflation améliore l’efficacité de la balance de prix de vente 

La première chose que nous enseignons aux investisseurs immobiliers qui entament le parcours du certificat en ingénierie financière multilogement est le concept d’actualisation de flux monétaires. En termes simples, nous montrons mathématiquement comment un dollar aujourd’hui vaut plus qu’un dollar dans 5 ans. Cela est un concept primordial puisque la valorisation d’un plex se fait en grande partie grâce à une analyse DCF (discounted cash flow ou analyse des flux de trésorerie actualisés). L’exercice est assez simple dans le cas d’une balance de prix de vente. Imaginez que le vendeur de l’immeuble que vous êtes en train d’acheter accepte de vous prêter 150 000$ du 300 000$ dont vous avez besoin comme mise de fonds. À des fins de simplification, il vous offre ce prêt à 0% d’intérêt étant donné que vous avez accepté de payer le prix demandé pour l’immeuble malgré qu’il y a avait quelques accrocs suite à l’inspection. L’avantage fiscal maximal pour le vendeur est de laisser ce montant en solde dû pendant 5 ans. Essentiellement, vous reportez d’être obligé de décaisser 150 000$ à dans 5 ans. Si l’inflation annuelle est de 4.5% pendant cette période plutôt que le 2% cible de la Banque du Canada, un exercice d’actualisation de cette valeur nous démontre que 150 000$ dans 5 ans vaut 123 000$ en dollars d’aujourd’hui. Nous pourrions donc dire que vous économisez théoriquement 27 000$, soit 18%. Maintenant, soulignons le fait que comme tout bon investisseur immobilier, vous n’allez pas laisser ce 150 000$ dormir dans un compte en banque. Et supposons que vos acquisitions vous génèrent habituellement un taux de rendement interne de 12.85%. Dans 5 ans, ce 150 000$ sera devenu presque 275 000$. Mais attendez un peu, 12.85% c’est vos acquisitions habituelles. Dans ce cas-ci, vous avez acheté l’immeuble avec une BPV représentant 50% de la mise de fonds utilisant donc un effet de levier de 87.5% et non 75%. Or, toutes choses égales par ailleurs, votre TRI devrait être d’environ 16-17% ce qui fait que votre capital vaut 325 000$ dans 5 ans. Et si vous avez réussi à faire une deuxième acquisition avec le 150 000$ que vous n’avez pas utilisé sur la première acquisition, probablement que vous avez acheté le même genre d’immeuble avec essentiellement le même genre de balance de prix de vente. Donc au final, au lieu d’avoir généré 12.85% de taux de rendement internes sur 300 000$, vous avez réussi à générer 16 à 17% sur ce même 300 000$ simplement parce que vous avez compris que la relation entre le taux d’inflation et votre coût moyen pondéré en capital de dette vous avantage. Or, dans 5 ans, vous aurez réellement 650 000$ au lieu de 550 000$. Étant donné que l’inflation a eu un effet positif sur vos revenus nets normalisés et le TGA paritaire, votre immeuble sera capable de rembourser les balances de prix de vente par mécanisme de refinancement ou de vente en plus du rendement pur que vous avez fait et que je vous ai décortiqué il y a quelques secondes. En réalité, vous aurez probablement plus de rendement que ça, mais il y a des chances qu’il soit gelé dans l’immeuble sous forme d’équité non refinançable (soit l’équité entre le prêt de 75% et 85% de la valeur de l’immeuble et la valeur de l’immeuble). 

Le levier c’est dangereux, non ? 

J’aimerais commencer par souligner que j’ai tenté de réduire l’exemple ci-haut dans sa forme la plus simpliste afin qu’un maximum d’investisseurs immobiliers puisse profiter de la réflexion que cet article peut initier. Je pourrais vous présenter un modèle mathématique plus complet, mais cela dépasserait l’objectif de ce texte. L’autre point à souligner est l’effet de levier dans l’équation. Plusieurs diront que l’effet de levier est dangereux, et ils ont raison. L’effet de levier est un couteau à double tranchant, une sorte d’épée de Damoclès. Mais, c’est aussi la huitième merveille du monde, selon Albert Einstein apparemment. C’est pourquoi le Collège MREX répète sans cesse l’importance de s’éduquer et de s’outiller. L’immobilier n’est pas un jeu d’enfant, ce n’est pas facile et ce n’est pas simple. L’ingénierie financière se concentre non seulement sur l’aspect croissance et maximisation de rendements, mais surtout sur la gestion de risques. Une chose est sûre, dès que l’on comprend l’effet du temps sur la valeur de l’argent ainsi que le concept de taux d’intérêt réel (le taux nominal moins le taux d’inflation), on réalise que la question n’est pas si l’on doit utiliser du levier, mais plutôt comment utiliser un effet de levier de manière optimale tout en se protégeant contre les risques qui y sont associés. 

Ressources supplémentaires 

J’espère que ceci a été un guide intéressant servant à vous amener à mieux comprendre non seulement la balance de prix de vente, mais aussi l’inflation. Si vous désirez en apprendre davantage sur les concepts discutés ci-haut, je vous invite à consulter les articles et vidéos suivants :

Devenir un investisseur immobilier sophistiqué et en contrôle